Une histoire de briques et de blocs, de manuel perdu et de technologies ouvertes

D’après l’article de Christian Heilmann A tale of bricks and lost manuals

(traduction MozFr : Alice, Banban, Goofy, Pandark, Sphinx)

Legos en vrac

Photo par bdesham (CC BY-SA 2.0)

Quand j’étais gamin, j’ai hérité quelque chose d’extraordinaire de la part de mes frères aînés : une énorme boîte de briques de Lego en vrac. Cette boîte avait été remplie au fil des années mais on avait perdu en cours de route les manuels d’origine qui indiquaient comment assembler les briques pour réaliser l’un des modèles : une voiture, un bateau, une maison et pas mal d’autres choses. Il ne me restait plus que les briques et il me fallait utiliser ma propre ingéniosité et ma créativité pour parvenir à réaliser des objets en tout genre.

J’avais la possibilité de le faire grâce à l’interopérabilité des briques. C’est là que résidait le génie particulier des Lego : les briques d’autrefois étaient parfaitement compatibles avec les nouvelles et il suffisait par exemple d’ajouter une tuile de toit à une voiture pour avoir un déflecteur génial.

J’ai créé des trucs incroyables. Certaines des mes œuvres avaient besoin de mon regard visionnaire pour devenir ce que je racontais aux autres qu’elles étaient, n’empêche que pour moi, elles étaient fantastiques. Quand j’allais sur le terrain de jeux et que les autres gamins, plus riches, avaient des super voitures, des bateaux et des avions, bien sûr, j’étais un peu jaloux. Mais quand je voyais qu’ils laissaient tomber une de leurs voitures les choses étaient différentes. Leur petite voiture était cassée, il fallait qu’ils aient casser les pieds à leurs parents pour en avoir une nouvelle et ils jetaient celle qui leur faisait tellement plaisir si peu de temps avant. Quand j’abandonnais mes voitures, les pièces pouvaient bien s’éparpiller, je pouvais toujours les ré-assembler. Ou sinon j’étais tout fier d’en faire un avion ou un bateau.

L’idée magnifique d’assembler les choses à partir de briques réutilisables m’est revenue en tête lorsque, bien plus tard, je suis devenu développeur web. J’avais sous la main le HTML, le CSS et le JavaScript et le monde m’appartenait. J’avais le pouvoir de rendre un poème magnifique à voir ou de faire voltiger des trucs en travers de l’écran. Les briques élémentaires me donnaient du pouvoir et étaient faciles à repérer. Les autres pouvaient apprendre à partir de ce que je faisais. Les manuels s’écrivaient d’eux-mêmes puisque le produit permettait à ceux qui connaissaient les briques de les observer pour voir comment je les avais combinées. Voilà comment j’en suis arrivé à ce que je suis aujourd’hui. Ce ne sont ni des cours hors de prix, ni un diplôme, ni même un bout de papier ou encore un mot de passe qui me définissent aujourd’hui comme un créateur.

Je crois que tout cela a plus ou moins disparu. Nous pensons que les logiciels, et plus particulièrement ceux de l’univers mobile, sont restreints à des environnements fermés, et à certaines personnes qui peuvent y accéder et les utiliser. C’est un marché malsain régi par l’appât du gain et où les produits doivent se périmer rapidement afin d’en vendre plus. Et personnellement, je ne trouve pas que ça soit très créatif.

Heureusement, je travaille pour une entreprise qui partage ma vision des choses et qui a créé Firefox OS. C’est un système d’exploitation pour mobiles qui rend au Web le mérite qui lui revient. Le système d’exploitation lui-même et les applications sont tous écrits en HTML5, CSS et JavaScript – et toutes ses composantes du système d’exploitation sont open source. Rien n’est caché, tout est partagé. L’idée est de reprendre le modèle à succès des standards ouverts sur ordinateur et de le transposer à l’univers mobile.

logo Firefox OS

Parlons du monde entier, justement – nous sommes en train de faire vraiment la différence grâce à des partenaires comme Deutsche Telekom et Telefonicá avec lesquels nous apportons la connectivité mobile au monde. Le système d’exploitation est déjà distribué en Espagne, en Pologne, au Vénézuéla et en Colombie. Ce trimestre, cette liste s’étendra à de nouveaux marchés. En Espagne par exemple, un téléphone tournant sous Firefox OS est disponible en boutique pour 79€, débloqué et sans engagement. Et ce tarif inclut en outre 30€ de crédit pour acheter des applications pour le téléphone. En Pologne, des téléphones sont proposés pour un zloty (environ 23 centimes d’Euros) avec abonnement ou à 404 zlotys (environ 95€) sans engagement. Les applications peuvent être achetés sans carte de crédit – à la place, vous pouvez les payer avec votre facture de téléphone ou une carte SIM prépayée. Tout cela me rappelle le temps où j’étais jaloux des gosses de riches avec leurs jouets luxueux : le logiciel est modulable et peut être personnalisé selon les besoins et les environnements. Qu’une expérience mobile appréciable soit aujourd’hui dépendante d’un matériel cher et d’un engagement de 24 mois, comme ce qui est proposé dans certaines régions du monde, c’est pour moi un grand pas en arrière. On l’appelle le World Wide Web, pas “Bienvenue au monde occidental”. Être connecté au Web mobile tout en conservant la possibilité d’utiliser les applications hors ligne et proposer une vraie expérience n’est pas quelque chose dont seuls les riches ont besoin. Au contraire – il y a un nouveau marché d’envergure, plein de gens avides d’informations qui devraient avoir une chance de prendre part à la vaste mise en commun des connaissances de l’humanité.

Firefox en lego par Justin Dolske

Photo et réalisation par Justin Dolske (CC BY-SA 2.0)

Et c’est là que vous entrez en jeu : entrepreneurs, développeurs, designers, écrivains, testeurs, créatifs. Nous vous donnons les briques interopérables et la plateforme pour distribuer vos produits. Nous ne considérons pas les technologies du Web comme un citoyen de seconde zone et ne vous faisons pas payer pour développer ou apprendre avec nous une nouvelle technologie – nous vous proposons plutôt d’utiliser ce qui fonctionne déjà, de lui donner une expérience plus riche et intéressante et de l’apporter aux personnes qui en ont besoin et qui le veulent, mais qui jusqu’à présent n’y avaient pas accès.

Le Web mobile est parmi nous, il est nécessaire et il fonctionne. Nous n’aurons pas la possibilité d’avoir partout dans le monde des ordinateurs de bureau avec une connectivité filaire à haut débit. Mais nous disposons d’une infrastructure mobile qui peut être utilisée et améliorée. La génération actuelle et celle qui arrive pensent d’abord mobile et nous voulons que vous puissiez les atteindre sans avoir à vous limiter à une seule plateforme. Développer en HTML5 signifie que vous pouvez convertir vos produits pour Android et iOS. Si vous commencez en développant pour iOS cela signifie que vous devrez recommencer à zéro quand la plateforme suivante prendra le relais. Et puis il y en aura une autre. Il y en a toujours une autre. Croire qu’on peut créer quelque chose de fermé et déclarer que c’est ce qu’il y a de mieux et ne sera jamais remplacé, voilà une illusion séduisante et puissante, et il y a toujours des entreprises qui tombent dans le panneau. Le Flash était incroyable et c’était la seule façon d’offrir des expériences riches à l’utilisateur, vous vous souvenez ?

Bien sûr, ça fait peur. Travailler dans un environnement modulable n’est pas donné à tout le monde. Je travaille à la maison ou en déplacement et mon emploi du temps est partout à la fois, car je vois bien que les gens avec qui je travaille sont dispersés tout autour du monde/à travers le monde. Quelquefois ma journée de travail commence à 4 heures et finit à deux heures du matin. J’adore ça. J’aime cette flexibilité et je me trouve entouré de gens incroyablement créatifs qui contrôlent leur propre carrière, ce qu’ils produisent et leur destin. C’est tout à fait comme être un entrepreneur. Faites le grand saut, faites confiance aux briques, et je vous promets que vous pourrez construire pour aujourd’hui et demain. Faire du vélo aussi, ça fait peur la première fois, au premier essai, mais plus tard vous serez libéré des horaires des transports, vous irez bien plus vite que les voitures dans le centre ville et vous garderez la forme tout en vous déplaçant. II en va de même lorsque vous vous libérez de l’idée qu’un environnement fermé est le seul domaine dans lequel vous pouvez produire quelque chose.

Bon, d’accord, les Lego ont changé. Maintenant on a des personnages de Star Wars et d’Harry Potter en lego, et beaucoup d’autres thèmes en lego. Et pourtant les briques de base sont toujours là et donnent toujours les même pouvoirs magiques qu’autrefois — elles peuvent transformer les consommateurs qui cassent leurs jouets en créateurs qui les réalisent. C’est vous-même, sur le Web ouvert, avec des technologies ouvertes et libres, qui allez concevoir des choses dont je n’ai pas la moindre idée. Vous êtes invité, vous êtes libre de choisir et il y a tant à découvrir. Venez avec moi découvrir les briques avec lesquelles nous bâtirons des choses extraordinaires.


Firefox en Lego terminé

Photo et réalisation par Justin Dolske (CC BY-SA 2.0)

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